L’économie souterraine dans le monde
Qu’ont en commun le chauffeur d’un taxi pirate sans licence à New York, une couturière à la pièce travaillant depuis son domicile à Mumbai, et un vendeur de tortillas dans la rue à Mexico ? Ils sont tous membres de l’économie souterraine, un marché non réglementé vaguement défini, non entravé par des taxes, des autorisations gouvernementales ou des protections humaines. Selon les statistiques officielles d’avant la récession mondiale, l’économie souterraine représentait plus de 50 % du travail non agricole en Amérique latine ; ce chiffre atteignait même 80 % dans certaines régions d’Asie et d’Afrique (Chen 2001). Un article récent du Wall Street Journal traite des défis, des paramètres et des avantages surprenants de ce marché informel. Les salaires perçus dans la plupart des emplois de l’économie souterraine, en particulier dans les pays périphériques, sont dérisoires : quelques roupies pour un bracelet fait main sur un marché, ou peut-être 250 roupies (5 dollars américains) pour une journée de vente de fruits et légumes (Barta 2009). Mais ces sommes minuscules marquent la différence entre la survie et l’extinction pour les pauvres du monde.
L’économie souterraine n’a jamais été considérée très positivement par les économistes mondiaux. Après tout, ses membres ne paient pas d’impôts, ne contractent pas de prêts pour développer leurs entreprises et gagnent rarement assez pour réinjecter de l’argent dans l’économie sous forme de dépenses de consommation. Mais selon l’Organisation internationale du travail (une agence des Nations unies), quelque 52 millions de personnes dans le monde vont perdre leur emploi en raison de la récession mondiale actuelle. Et si les habitants des pays industrialisés savent que des taux de chômage élevés et des filets de sécurité gouvernementaux limités peuvent être effrayants, leur situation n’est rien comparée à la perte d’un emploi pour ceux qui arrivent à peine à survivre. Une fois que cet emploi disparaît, les chances de rester à flot sont très minces.
Dans le contexte de cette récession, certains voient l’économie souterraine comme un acteur clé pour maintenir les gens en vie. En effet, un économiste de la Banque mondiale attribue aux emplois créés par l’économie informelle une des principales raisons pour lesquelles les nations périphériques ne sont pas en plus mauvaise posture durant cette récession. Les femmes, en particulier, bénéficient du secteur informel. La majorité des femmes économiquement actives dans les pays périphériques sont engagées dans le secteur informel, qui est quelque peu protégé de la récession économique. Le revers de la médaille, bien sûr, est qu’il est également protégé de la possibilité d’une croissance économique.
Même aux États-Unis, l’économie informelle existe, mais pas à la même échelle que dans les nations périphériques et semi-périphériques. Elle peut inclure des nounous, des jardiniers et des femmes de ménage au noir, ainsi que des vendeurs de rue et des chauffeurs de taxi sans licence. Il y a aussi ceux qui gèrent des entreprises informelles, comme des garderies ou des salons, à partir de leur maison. Les analystes estiment que ce type de travail pourrait représenter 10 % de l’économie américaine globale, un chiffre qui devrait augmenter à mesure que les entreprises réduisent leurs effectifs, laissant davantage de travailleurs chercher d’autres options. En fin de compte, l’article suggère que, qu’ils vendent des vins médicinaux en Thaïlande ou des bracelets tissés en Inde, les travailleurs de l’économie souterraine ont au moins ce que la plupart des gens désirent par-dessus tout : une chance de rester à flot (Barta 2009).