Marie Curie – Les percées de la recherche (1897-1904)

Rayons X et rayons d’uranium

Le choix de Marie Curie pour son sujet de thèse a été influencé par deux découvertes récentes d’autres scientifiques. En décembre 1895, environ six mois après le mariage des Curie, le physicien allemand Wilhelm Roentgen découvre une sorte de rayon capable de traverser du bois ou de la chair solide et de produire des photographies des os de personnes vivantes. Roentgen a baptisé ces rayons mystérieux « rayons X », X signifiant inconnu. En reconnaissance de sa découverte, Roentgen est devenu en 1901 le premier lauréat du prix Nobel de physique.

Une des premières photographies aux rayons X de Roentgen — la main d’un collègue (notez l’alliance). La révélation des rayons X fascine le public et laisse les scientifiques profondément perplexes

Henri Becquerel, découvreur du rayonnement de l’uranium. Bien qu’il ait essayé d’aider les Curie à résoudre leurs problèmes financiers et à faire progresser leur carrière, la relation a fini par se détériorer – comme cela se produit parfois avec des scientifiques sensibles au partage du crédit pour les découvertes.

Au début de 1896, quelques mois seulement après la découverte de Roentgen, le physicien français Henri Becquerel a signalé à l’Académie française des sciences que les composés d’uranium, même s’ils étaient conservés dans l’obscurité, émettaient des rayons qui embueraient une plaque photographique. Il avait fait cette découverte par hasard. Malgré la découverte intrigante de Becquerel, la communauté scientifique a continué à concentrer son attention sur les rayons X de Roentgen, négligeant les rayons de Becquerel ou les rayons d’uranium, beaucoup plus faibles.
L’IGNORATION DES RAYONS D’URANIUM a séduit Marie Curie. Comme elle n’aurait pas à lire une longue bibliographie d’articles publiés, elle pourrait commencer immédiatement des travaux expérimentaux sur eux. Le directeur de l’École municipale de physique et de chimie industrielles de Paris, où Pierre était professeur de physique, lui permit d’utiliser comme laboratoire un débarras encombré et humide.

Une technique astucieuse fut la clé de son succès. Une quinzaine d’années auparavant, Pierre et son frère aîné, Jacques, avaient inventé un nouveau type d’électromètre, un appareil permettant de mesurer des courants électriques extrêmement faibles. Marie utilise maintenant l’électromètre de Curie pour mesurer les faibles courants qui peuvent passer dans l’air qui a été bombardé par des rayons d’uranium. L’air humide du débarras avait tendance à dissiper la charge électrique, mais elle réussit à faire des mesures reproductibles.

Au lieu de faire agir ces corps sur des plaques photographiques, j’ai préféré déterminer l’intensité de leur rayonnement en mesurant la conductivité de l’air exposé à l’action des rayons.

Cet appareil de mesure électrique précise, inventé par Pierre Curie et son frère Jacques, était indispensable aux travaux de Marie. (Photo ACJC)

Vous pouvez quitter ce site pour une exposition sur la découverte de l’électron

Avec de nombreuses expériences, Marie confirme les observations de Becquerel selon lesquelles les effets électriques des rayons d’uranium sont constants, que l’uranium soit solide ou pulvérisé, pur ou dans un composé, humide ou sec, ou qu’il soit exposé à la lumière ou à la chaleur. De même, son étude des rayons émis par différents composés d’uranium valide la conclusion de Becquerel selon laquelle les minéraux contenant une plus grande proportion d’uranium émettent les rayons les plus intenses. Elle est cependant allée au-delà des travaux de Becquerel en formulant une hypothèse cruciale : l’émission de rayons par les composés d’uranium pourrait être une propriété atomique de l’élément uranium – quelque chose d’intégré à la structure même de ses atomes.

La SIMPLE HYPOTHÈSE D’ARIE allait s’avérer révolutionnaire. Elle allait finalement contribuer à un changement fondamental dans la compréhension scientifique. À l’époque, les scientifiques considéraient l’atome – un mot qui signifie indivis ou indivisible – comme la particule la plus élémentaire. La découverte de l’électron par d’autres scientifiques à peu près à la même époque a donné à penser que cette idée ancienne était fausse. Mais personne ne saisit la structure interne complexe ni l’immense énergie stockée dans les atomes. Marie et Pierre Curie eux-mêmes n’étaient pas convaincus que l’énergie radioactive provenait de l’intérieur des atomes – peut-être, par exemple, la terre était-elle baignée de rayons cosmiques, dont l’énergie était captée et diffusée par certains atomes ? Le véritable exploit de Marie a été de trancher dans les observations compliquées et obscures par une analyse limpide de l’ensemble des conclusions qui, bien qu’inattendues, étaient logiquement possibles.

Marie a testé tous les éléments connus afin de déterminer si d’autres éléments ou minéraux rendraient l’air plus conducteur d’électricité, ou si l’uranium seul pouvait le faire. Dans cette tâche, elle a été aidée par un certain nombre de chimistes qui ont fait don de divers échantillons de minéraux, dont certains contenaient des éléments très rares. En avril 1898, ses recherches révèlent que les composés du thorium, comme ceux de l’uranium, émettent des rayons de Becquerel. Là encore, l’émission semble être une propriété atomique. Pour décrire le comportement de l’uranium et du thorium, elle inventa le mot radioactivité -basé sur le mot latin pour rayon.

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